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Interview Ouest-France 28/11/2023

Entre Domfront, Paris et Flers, l’héroïne Marie Lelandais vit les secousses du XIXe siècle

Interview réalisé le 10 novembre 2023


1. Le roman "Le Prix de Vertu" est fortement ancré dans l'histoire de la France, en particulier dans la région de Flers. Comment Flers et ses environs ont-ils influencé votre écriture et la façon dont vous avez décrit le cadre historique du roman ?

Je peux dire que ce n’est pas Flers qui a influencé l’écriture de mon roman, mais plutôt un de ses personnages illustres qui était Julien Salles.

Julien Salles avait rencontré Marie Lelandais lorsque celle-ci, est revenue vivre à Flers en 1870, alors qu’elle fuyait la guerre qui s’installait à Paris.

Elle revenait dans l’Orne, après maintes péripéties et après avoir sauvé la femme de son employeur et ses enfants.

Julien SALLES raconte lui-même qu’il était admiratif des actes d’héroïsme qu’elle avait faits. Il avait eu l’occasion de la rencontrer et de lui faire raconter sa vie.

De ce récit, il fit un courrier qu’il adressa à l’Académie française afin qu’un prix de vertu ou prix Monthyon soit décerné à Marie pour être venue à la rescousse de ses maîtres, après une faillite qui, à cette époque, était fortement condamnable et dont les auteurs se trouvaient ostracisés par la société. Elle dut alors faire preuve d’une grande force de caractère pour aider cette famille à se remettre sur pied et à reconstruire leur vie tant moralement que financièrement. C’était un acte d’une grande humanité et de solidarité, au dépens de sa famille, et surtout de son amour.

Le cadre historique de ce roman se situe dans le pays bas-normand.

Dans le premier volume, Marie habite Saint Fraimbault et Passais, le deuxième est entièrement consacré à Domfront où une autre vie s’ouvrit à elle et le troisième se passe à Paris et à Flers.

Marie est née dans le Domfrontais et j’ai voulu commencer cette saga historique en parlant de ses grands-parents qui se sont affrontés pendant l’époque révolutionnaire.

Ce qui explique pourquoi la vie de Marie a été ce qu’elle fut.

Je parle des conditions de vie très rudes dans la campagne profonde, de la dure vie des bonnes de ferme, mais aussi de la bourgeoisie domfrontaise, et notamment de cette famille Louvel qui respectait ses employés. J’ai découvert en ce Louvel, qui était banquier, un précurseur des méthodes agricoles modernes (de l’époque), puisqu’il créa la ferme école du Saut Gautier.

L’histoire de Marie m’entraîne ensuite à Paris et puis enfin à Flers que je connais très bien également.

Je suis ornaise et j’ai effectué une partie de mes études à Flers.

J’ai fait partie du cercle généalogique du pays bas-normand dès ses débuts, avec Monsieur Peschet. J’ai également fait partie de l’organisation, en 1989, d’une grande exposition intitulée « Chouans et prêtres réfractaires » à Tinchebray.

J’ai toujours été passionnée d’histoire locale, de l’histoire de mes ancêtres et j’étais, et suis toujours, avide de récits historiques locaux.

2. Votre travail de recherche pour ce roman semble avoir été très approfondi, impliquant des visites aux archives, des études d'histoire locale et des explorations de lieux historiques. Pouvez-vous nous parler de certaines découvertes étonnantes que vous avez faites au cours de vos recherches, en particulier celles liées à Flers et ses alentours ?

L’écriture de ce roman ne s’est pas faite en quelques jours, de fait je me suis rendue à plusieurs reprises aux archives départementales, à la médiathèque de Flers et de Domfront. J’ai parcouru la campagne du pays bas- normand pour bien m’imprégner de l’ambiance, même si cette histoire se passe au 19ème siècle.

J’ai eu dans ma famille des personnes qui habitaient des petites maisons perdues au fond d’un chemin, entourées d’un plant et de champs où les vaches paissaient tranquillement et d’une cour (non bitumée évidemment), où les poules se promenaient librement. Il n’a pas été compliqué pour moi de décrire cet environnement que je connaissais bien, ainsi que l’intérieur des maisons dans lesquelles seule la cheminée servait de chauffage. J’aimais écouter ces personnes raconter leur enfance et leur vie d’antan.

En ce qui concerne Flers, (période de 1870 à 1902) les cartes postales anciennes m’ont beaucoup aidée pour la description tout comme les anciens journaux de l’époque qui m'ont servi à m'imprégner de l'ambiance du moment.

Je parle dans mon récit du rachat du château de Flers qui appartenait à la famille Schnetz, par Julien Salles et de l’inauguration de l’hôtel de ville, ainsi que des festivités qui ont eu lieu à cette occasion réunissant des milliers de personnes.

C’est d’ailleurs le jour que Julien Salles, maire, a choisi pour annoncer que Marie Lelandais allait recevoir le prix de vertu et qu’il lui remit la médaille de la ville pour ses 40 années passées au travail de la plume. De fait, le dernier travail de Marie était modiste, dans une boutique de mode, rue Saint Germain à Flers. À l’époque, on utilisait beaucoup les plumes pour agrémenter les chapeaux.

Juste en aparté, mes recherches me mènent en Californie où j'ai retrouvé un des personnages de mon livre, ce qui pourrait peut-être faire l'objet d'un prochain roman....

3. "Le Prix de Vertu" est basé sur l'histoire vraie de Marie Lelandais. Pouvez-vous partager avec nous comment vous avez décidé de donner vie à cette histoire, et pourquoi vous avez ressenti le besoin de la raconter à travers ce roman en trois tomes ?

C’est l’arrière grand-mère de mes enfants qui, un jour, m’a remis la copie du courrier que Julien Salles avait adressé à l’Académie française. Elle habitait dans un hameau du domfrontais, à Saint Denis de Villenette. Elle m'a dit : « J’ai quelque chose pour toi, c’est un courrier d’un maire de Flers sur la vie de la tante de mon père. Elle a reçu, grâce à lui, une médaille pour le bien qu’elle avait fait durant sa vie. »

J’ai trouvé cette histoire très belle. Dans un premier temps, je me suis dite que j’allais la resituer dans son milieu historique et en faire un écrit qui servirait de passe mémoire pour mes petits-enfants. Or, je me suis prise au jeu, je voulais savoir et comprendre et j’ai fait énormément de recherches comme je vous l’ai expliqué. Riche d’informations, le mémoire de Julien Salles de 5 ou 6 pages s’est transformé en une saga de 3 volumes. Bien sûr, dans ce roman, des personnages ont réellement existé, d’autres ont été inventés mais restent plausibles. Je ne voulais pas faire un roman triste et larmoyant, alors j'ai décrit une Marie pleine d'énergie et d'humour. Les clins d'œil à l'histoire de France sont puisés dans des anecdotes et pour lier le tout, en arrière-plan intervient une histoire d'amour.

(Juste pour info, la médaille est toujours dans la famille)

4. Pouvez-vous nous en dire plus sur le processus d'écriture de votre roman ? Comment avez-vous abordé la création des personnages, en particulier ceux qui ont réellement existé et ceux que vous avez imaginés ?

Au départ, j’ai repris tous les détails du récit de Julien Salles. J’en ai fait un fichier chronologique où apparaissaient les dates, les personnages réels, les faits et les recherches à faire.

Au fur et à mesure de mes recherches, j’écrivais un texte en me posant sans cesse des questions : comment vivait-on à cette époque, que mangeait-on, comment les personnes étaient-elles habillées, qui gouvernait la France à cette époque, que pensait Marie de sa condition de vie, quelle était la météo, etc…

Quand Marie est partie pour Paris, il m’a fallu décrire son déplacement en 1861. Dans quelles conditions ce voyage s’était-il passé, puis je me suis posée la question de son arrivée à Paris, où avait-elle bien pu loger, quel était le prix d’un loyer à cette époque, comment trouver du travail, etc..

Comment pensait Marie, que faisait-elle, comment parlait-elle….

Marie a vécu à Paris de 1861 à 1870 ; il a été alors très intéressant de me plonger dans les écrits du Paris haussmannien et de la politique de Napoléon III.

J'ai également travaillé sur l'exposition 1889 au cours de laquelle une récompense de prestige fut décernée à un des enfants sauvés par Marie, devenu grand couturier.

Il m’a fallu me documenter également sur Flers au temps de la guerre 1870 et après, jusqu’en 1902. Les anciens journaux que nous pouvons maintenant trouver sur le net m’ont été très utiles pour comprendre cette période et la décrire.

La construction de ce roman est le fruit d’un véritable travail de détective pour être au plus proche de ce qu’était la réalité.

Par exemple : dans son récit, Julien Salles dit que Marie a été embauchée au service de la famille Louvel à Domfront et, je cite : « que ses maîtres l’apprécièrent comme excellente cuisinière ».

La question que je me suis posée était de savoir comment Marie, qui avait travaillé auparavant comme bonne de ferme et n’avait pas été scolarisée, pouvait devenir cuisinière et ensuite gouvernante des enfants. J’ai donc imaginé un personnage, une vieille cuisinière et bonne personne qui pouvait transmettre son savoir.

Quelques mois après, lors de mes recherches, j’ai retrouvé sur un registre de recensement de 1851 qu’il existait bien dans la maison Louvel une personne qui s’appelait, non pas Madeleine, comme je la nomme, mais Lesellier Jeanne qui était « ancienne domestique – 76 ans » et qui ne travaillait plus mais qui vivait encore ses chez maîtres.

Je n'étais pas loin de la réalité !

5. "Le Prix de Vertu" est sorti en autoédition. Pourriez-vous nous expliquer les raisons de ce choix et les défis que vous avez rencontrés lors de ce processus d'autoédition?

Lorsque mon premier volume a été terminé, je l’ai transmis à une maison d’édition normande, spécialisée dans le régionalisme et l’histoire locale. Après avis favorable du comité de lecture, mon livre devait être édité. Quelques semaines plus tard, la maison est revenue sur sa décision prétextant que je n’habitais plus en Normandie et que cela pouvait être ennuyeux pour la promotion du livre.

Plus tard, un autre éditeur de la région bordelaise m’a dit qu’il aurait bien édité mon roman, mais que malheureusement l’histoire ne se passe pas en Aquitaine.

Alors j’ai pris mon courage à deux mains et je me suis lancée dans l’autoédition.

Ce qui veut dire : mise en page, conception graphique de la couverture, de la tranche, dépôt légal à la BNF, ISBN, etc..

C’était assez laborieux, mais j’ai réussi !

Le point noir de cette solution est que l’auteur doit faire lui-même la promotion du livre et l’avance financière des impressions. J’édite donc les livres par petites quantités à chaque fois. La FNAC de Bergerac et des librairies du 47 ou 24 ont accepté de prendre mon roman autoédité en dépôt vente, mais si je dois retirer leur commission, il ne me reste que quelques centimes d’euros au final…J'en laisse quelques uns, plus pour le "fun" que pour le profit.

Pour faire connaître mon roman, je n’ai guère de solutions puisqu’il est impossible dans ces conditions qu’il se retrouve dans les réseaux de distribution.

Etant artiste peintre, je profite donc des expositions estivales que je fais pour le promouvoir.

J’ai fait un site internet www.leprixdevertu.com que j'alimente régulièrement par des posts sur des personnages ou anecdotes que j'ai trouvés lors de mes recherches . Les personnes abonnées peuvent ainsi continuer à explorer et comprendre l'univers de Marie et de son histoire.

Je communique également beaucoup par les réseaux sociaux. J’ai ouvert une page Facebook : www.facebook.com/leprixdevertu et instagram : www.instagram.com/guylainelpv , le tout dédié à cette saga.

J’ai des bons retours et j’ai déjà un bon réseau de lecteurs et lectrices qui me suivent et m’encouragent.

Bien souvent, on me dit que cette saga est digne d’une série télévisée. Pourquoi pas ?? Peut-être qu’un jour cette saga historique interpellera un producteur…Allez savoir !

6. En terminant, quelle leçon ou quel message aimeriez-vous que les lecteurs retiennent de "Le Prix de Vertu" et de l'histoire de Marie Lelandais ?

Mon but premier était de transmettre l’histoire de Marie Lelandais à mes petits-enfants pour qu’ils sachent qu’elle était la vie de leurs ancêtres. Mais désormais cette saga ne s’adresse pas qu’à eux.

Comme je vous l’ai dit, je suis passionnée de généalogie et d’histoire locale et je pense que pour nous permettre de comprendre notre histoire et pourquoi pas, pour nous aider à façonner notre avenir avec sagesse et respect, il est important d’avoir ce devoir de mémoire.

Si vous avez des dates d’événements littéraires prévus dans l’Orne, vous pouvez les préciser afin de les signifier dans l’article.

C’est avec plaisir que je peux vous annoncer que je présenterai et dédicacerai mon roman à la médiathèque de Bellou-en-Houlme (61) le vendredi 22 décembre à…………

Je suis, comme on dit dans la contrée, « une fille de Bellou », et cela me réjouit de retourner dans mon village natal pour la première présentation officielle de mon roman.


ARTICLE DE PRESSE PARU DANS OUEST-FRANCE DU 28 NOVEMBRE 2023








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